La question (et la réponse) du jour
« On dit toujours qu’il faut écrire « quatre-vingts ». Pourtant, dans Victor Hugo (« Booz endormi »), on trouve dans toutes les éditions « … a passé quatre-vingt »… Si c’est une erreur de l’écrivain, pourquoi la reproduit-on ? Ou bien serait-ce une graphie correcte à son époque ? »
Non : nous avons ici un exemple de « licence littéraire »… On entend par « licence littéraire » le droit reconnu aux écrivains – presque uniquement aux poètes – de transgresser la règle et l’usage en quelques cas nettement circonscrits. C’est par « licence poétique » que l’on supprime souvent, en poésie classico-romantique, un « s » en bout de vers, afin d’obtenir la rime visuelle, c’est-à-dire celle qui ajoute au plaisir sonore d’une conformité phonique la satisfaction oculaire d’une similitude graphique.
Victor Hugo a en effet volontairement aligné (au « g » près) un quatre-vingt sur vînt :
Comment se pourrait-il que de moi ceci vînt ?
Le chiffre de mes ans a passé quatre-vingt…
(La Légende des siècles, « Booz endormi ».)
*****