Archives mensuelles : mars 2023

Le mot du 28 mars 2023 (2)

Le bref dialogue historique du jour

« Mais c’est une révolte ?

— Non, sire, c’est une révolution ! »

Réponse du duc de LA ROCHEFOUCAULD-LIANCOURT (1747-1827), grand maître de la garde-robe, à LOUIS XVI, qu’il venait de réveiller dans la nuit du 14 au 15 juillet 1789, à Versailles, pour lui annoncer la prise de la Bastille, etc.

Le mot du 28 mars 2023 (1)

La question du jour (et la réponse)

La question du jour (et la réponse)

               « Cher Monsieur Colignon,

               Je pense à vous ces derniers temps en passant devant de grands panneaux publicitaires pour le parc zoologique de Mulhouse.

               Il y est écrit « Préservons pour l’avenir » sur une photo d’animal en voie d’extinction bénéficiant d’un programme de sauvegarde.

               Peut-on ainsi utiliser le verbe « préserver » sans complément, alors qu’il est transitif ? Je ne trouve pas dans le dictionnaire de 2e sens nominal qui signifierait « acte de préserver ».

               Voilà pourquoi le slogan me gêne, mais peut-être à tort ?

               Merci par avance pour le temps que vous prendrez à m’éclairer. J

               Bien cordialement. »

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Bonjour,

Même avec une ouverture d’esprit bienveillante, il ne me semble pas possible d’accepter cette construction, que personne, sauf erreur, ne mentionne, ne retient… Je mettrais, ce qui pourrait coller avec chacune des photos représentant un animal à protéger  :  « Préservons-les pour l’avenir ! ». Avec un peu plus de frais d’impression, en adaptant le slogan selon l’animal  :  « Préservons-le… », « Préservons-la… ».

Bien cordialement.

Le mot du 26 mars 2023 (1)

L’expression du jour

Selon Richard Dubreuil, auteur d’un ouvrage paru il y a une trentaine d’années (l’Epreuve d’histoire, Vuibert, 1989), l’expression « langue de bois », si elle vient bien du russe (dubovyj jazyk), remonterait au régime tsariste : « De l’expression russe : dubovyj jazyk, « langue de chêne », désignant le style administratif pesant de la bureaucratie tsariste.

Langage politique ou économique figé servant de véhicule à une idéologie (exemple : les discours et écrits officiels des régimes marxistes-léninistes). La langue de bois a des particularités lexicales, syntaxiques et stylistiques précises. »

En 1957, un dictionnaire soviétique mentionne (est-ce la première fois ?) un terme équivalant à « langage de bois » et dont le sens est : « langage bureaucratique ». En France, il semble que ce soit Gilles Martinet qui, dans son livre les Cinq Communismes, paru en 1971, ait repris l’expression, pour désigner le langage des officiels communistes. Depuis, l’expression est couramment employée dans la presse et les milieux politiques, syndicaux, etc.

En Pologne, l’équivalent – dretwa nowa – correspond à « parole de bois »…

Le mot du 25 mars 2023 (2)

Le petit point de langue française du jour

L’expression elle aussi ne se met pas obligatoirement entre virgules : Chloé est allée elle aussi manifester; mais on peut l’y mettre si l’on tient à bien détacher : Chloé est allée, elle aussi, manifester. C’est le scripteur ou la scriptrice qui décide, selon l’importance qu’on entend donner à l’expression et au fait qu’elle traduit.

Elle voulait elle aussi me parler = bien des gens voulaient me parler, et elle était du nombre; elle voulait, elle aussi, me parler = parmi ces gens qui voulaient me parler, je remarquais ses efforts pour y parvenir dans la cohue…

Le mot du 25 mars 2023 (1)

Le calembour du jour

Pour « détendre l’atmosphère », je ne vais pas, comme tel humoriste, écarter lentement devant moi mes bras tendus, mais donner un calembour (… bon, comme disait Louis XIV; enfin, si possible) :

« Attention ! Il ne faut pas que Pépé, le soir, à Pigalle, sans canne aille ! »

Le mot du 24 mars 2023 (1)

Le charabia du jour

Une fidèle correspondante, Mme Laustriat, me transmet ceci :

        « Bonjour,  Monsieur Colignon,

        À la radio (RTL) ce jour, entre 12 heures et 14 h30, le sujet majeur est bien entendu le report de la visite de Charles III à Paris, et les quelques phrases prononcées sur ce thème par E. Macron depuis Bruxelles, en corrélation avec le thème de la mobilisation intersyndicale prévue mardi 28 mars, qui empêche que cette visite d’État puisse s’effectuer dans des conditions optimales…

        La journaliste qui analyse l’événement (plutôt le non-événement !) a dit à au moins six reprises : « ici, on voit le « bouger » du président, il y a de sa part un « bouger », on note ce « bouger », etc.

        On peut parier que cette expression journalistique va faire florès, et qu’on l’entendra désormais souvent !

        Un « bouger », si j’ai bien compris, c’est donc un changement de discours, d’attitude, de stratégie, une évolution… Mais il est vrai qu’un « bouger », ça fait mieux !

        Un « bouger de président », tel un lever de soleil dans l’obscurité ? !

        Cordialement. »

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Merci de votre courriel.

Le niveau d’un nombre croissant de journalistes des médias radio et télévision est de plus en plus affligeant, avec un psittacisme affirmé  On peut alors craindre que leur façon d’exposer des faits, d’informer avec rigueur et impartialité (??!), soit en adéquation…   

Cette journaliste devrait être décorée de l’ordre du Charabia inepte, avec palme d’or.   La création de cet ordre honorifique devient prioritaire !

Bien cordialement.

Le mot du 23 mars 2023 (1)

La citation du jour

Je me permets, pour rendre hommage à deux grandes « plumes de canard » que j’ai côtoyés professionnellement, de reprendre ici un extrait de l’avant-propos d’Objectif zéro faute ! (éditions de l’Opportun / l’Etudiant), qui paraîtra en mai…

Grand journaliste, homme très cultivé, André Fontaine
a été l’un des directeurs du Monde à une époque où ce
journal était pour bien des gens « la » référence. Tout comme
le regretté Pierre Viansson-Ponté – autre célèbre plume
du quotidien –, André Fontaine s’est exprimé à plusieurs
reprises sur la langue française. Voici ce qu’il en disait dans
la France au bois dormant (Fayard éd., III, 1) :

« Le génie du français, celui qui fit de lui, au XVIIIe  siècle,
la langue de toute l’Europe, c’est sa clarté, son aptitude à
exprimer toutes les nuances de la précision. Qu’il continue
de se laisser envahir par les fumées de l’à-peu-près, par
les lourdeurs du nominalisme, et c’en sera vite fait de son
attrait et de sa réputation dans les pays où la culture fran-
çaise a survécu au déclin de la prépondérance française.
Il ne s’agit pas, bien entendu, de sauver à tout prix une
complexité orthographique et syntaxique héritée d’une
époque où une caste de bien-nés compliquait à loisir les
règles du bon parler
[…], mais d’aller dans le sens d’une
plus grande rigueur, d’une plus grande simplicité, au lieu
de substituer, comme certains paraissent curieusement s’y
croire tenus, un jargon élitiste à un autre. Y a- t-il en effet
quelque chose dont notre pauvre monde, gavé de mots
creux, ait davantage besoin que de la netteté de la pensée ? »

Le mot du 20 mars 2023 (1)

Palmarès de la Grande Dictée ludique de Tours du samedi 18 mars

M. Philippe Le Pape, président de Défense de la langue française – Touraine, me transmet le message suivant :

« Cher ami,

Merci encore pour votre dictée « haute en couleurs ».

Les 3 premiers lauréats à la « Grande dictée ludique » de Tours sont :

1re : Florence CHOBERT (3 fautes), venue d’Orléans.

2e : Alain GRANDEMANGE (4 fautes)

3e : Eugénie BERCHON (5 fautes).

Cordialement.« 

Le mot du 19 mars 2023 (3)

La deuxième question du jour (et la réponse)       

            « Bonjour, Monsieur Colignon,

            J’ai rencontré récemment : « ç’a commencé tel jour ».

            Que pensez-vous de cette élision ?

                        En vous remerciant. »

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   « ç’a été » doit, selon moi, être préféré à « ça a été », pour la raison exposée ci-dessous :

Je reprends ce que dit l’Académie  :  « Contrairement au pronom démonstratif ce, ça, l’abréviation familière du pronom démonstratif cela ne s’élide pas. Dans une langue soignée, écrite ou orale, on doit éviter de l’employer et, si la langue familière accepte des tours comme ça sera ou ça a été, il convient de rappeler qu’il est dans tous ces cas préférable de choisir ce. D’ailleurs, si l’oreille tolère ça sera ou ça a été, elle rejette ça fut et n’accepte que ce fut. Aussi, par analogie avec cette forme, préférera-t-on ce sera à ça sera et ç’a été (pour ce a été) à ça a été. Rappelons enfin que dans tous les cas où l’on emploie le pronom ce il est loisible de lui substituer cela (C’est bien difficile ou cela est bien difficile). »

Bien cordialement.

Le mot du 19 mars 2023 (2)

Le vocabulaire des psittacidés des médias et des pseudo-élites autoproclamées

Perroquets mais aussi très souvent « carpettes anglaises », ce qui est à mille lieues du journalisme tel que le concevaient Jacques Fauvet, André Fontaine ou Pierre Viansson-Ponté (que je cite à ce propos dans l’ouvrage à paraître en mai aux éditions de l’Opportun), nombre de commentateurs (surtout sur des chaînes télévisées), et aussi d’hommes et de femmes politiques, usent à tout instant des mêmes termes… Au palmarès, ces jours-ci : « à date » (employé pour dire « ce jour », « aujourd’hui », « en ce moment », « ces jours-ci ») et « en responsabilité », dont certain(e)s se gargarisent pour affirmer leur rôle important, le sérieux qu’ils ou elles apportent à leurs prises de position, etc.