Archives mensuelles : juin 2015

Le mot du 30 juin 2015

Correcteurs (suite)…

 

        Alors que Formacom, seule école de formation habilitée à délivrer le titre de correcteur reconnu par le ministère du Travail et enregistré au Répertoire national des certifications professionnelles, est menacée de fermeture faute d’aides publiques pour les demandeurs d’emploi qui souhaitent devenir correcteurs, il n’est peut-être pas inutile de reproduire ci-dessous deux textes concernant une profession méconnue qui contribue grandement à assurer à la langue française le niveau qui doit être le sien…

a)  En mars 2012, le futur président de la République, M. Hollande, en réponse à la question d’une correctrice, dans une coopérative d’activités et d’emploi, déclara : « Le besoin de correcteurs, je crois qu’il est réel, on ne va pas corriger simplement par des logiciels, il y a ce qui s’appelle tout simplement l’intervention humaine, parce que ce n’est pas simplement l’orthographe, c’est la qualité de la langue et la clarté de l’expression. C’est ça, votre rôle. »

b)  Dans sa chronique du mercredi 18 juin 1997, intitulée « La maison de correction », Pierre Georges, rédacteur en chef du Monde, à propos d’une coquille  laissée dans un article consacré au… bac philo, assumait la responsabilité de la rédaction, et dédouanait les correcteurs, auxquels, faute de temps, l’article imparfait n’avait pas été soumis. Il en profitait pour dresser avec verve  et  talent  un  bel hommage à ces « pêcheurs de perles » scrupuleux, à ces « nègres littéraires » discrets, surtout indispensables, qui sauvent même des réputations d’écrivains et de journalistes.

            « […] Et les correcteurs, direz-vous ? Les correcteurs n’y sont pour rien. Les correcteurs sont des amis très chers. Une estimable corporation que la bande à Colignon ! Une admirable entreprise de sauvetage en mer. Toujours prête à sortir par gros temps, à voguer sur des accords démontés, des accents déchaînés, des ponctuations fantaisistes. Jamais un mot plus haut que l’autre, les correcteurs. Ils connaissent leur monde, leur Monde même. Ils savent, dans le secret de la correction, combien nous osons fauter, et avec quelle constance. Si les correcteurs pouvaient parler !

            Heureusement, ils ont fait, une fois pour toutes, vœu de silence, nos trappistes du dictionnaire. Pas leur genre de moquer la clientèle, d’accabler le pécheur, de déprimer l’abonné à la correction. Un correcteur corrige comme il rit, in petto. Il fait son office sans ameuter la galerie. Avec discrétion, soin, scrupules, diligence. Ah ! Comme il faut aimer les correcteurs, et trices d’ailleurs. […]  Parfois, au marbre, devant les cas d’école, cela devient beau comme un Rembrandt, la Leçon* de correction !  »  

* Le L majuscule indiqué par Pierre Georges renvoie à l’un des chefs-d’œuvre de Rembrandt : la Leçon d’anatomie du docteur Tulp (c’est le titre le plus employé à propos de ce tableau).

Le mot du 29 juin 2015

battre la campagne

            Depuis de nombreuses semaines,  le président de la République parcourt la France et le monde à un rythme soutenu, très soutenu…  « Excessivement »,  disent de plus en plus ouvertement certains, qui mettent en parallèle l’absence de résultats tangibles dans le domaine de l’emploi et de l’économie, entre autres,  et le nombre des heures consacrées à des déplacements : commémorations diverses, inaugurations de chrysanthèmes, manifestations de compassion au moindre accident,  ruban à couper pour l’érection d’un bâtiment,  multiples décorations à distribuer…

        Faut-il voir dans ces très fréquents déplacements, notamment ceux effectués en France,  un excès condamnable, déraisonnable, qui nuit à l’exercice des lourdes tâches incombant au chef de l’État, sous la Ve République ?…  Doit-on y déceler l’attitude d’un président sortant déjà en campagne électorale en vue d’une éventuelle réélection ?…  Ou bien s’agit-il du comportement normal, bien naturel, d’un hôte de l’Élysée ?… À chacun sa réponse, sans doute.

       S’ils sont entrés, deux ans avant l’échéance électorale, en campagne politique, on dit alors d’un homme ou d’une femme politique qu’ils se mettent en campagne, qu’ils battent la campagne, au sens de « battre le terrain » afin de rencontrer, et de convaincre, les électeurs.  Dans le domaine de la chasse, battre la campagne signifie parcourir les terres çà et là afin de faire lever le gibier, et l’expression a été étendue au sens de « chercher quelqu’un qui s’y terre, qui s’y est caché… voire qui s’y est perdu » (cf. faire des battues). Les électeurs peuvent-ils être assimilés à du gibier à poil ou à plume ?

            Quand un locuteur ou un scripteur se perd dans son propos, dans ses raisonnements, quand il s’égare aussi  çà et là dans des digressions de plus en plus oiseuses, on dit également qu’il bat la campagne (ou que son esprit, son imagination, son discours, ses livres… battent la campagne). Commentant la maladresse de la follette Perrette emportée par ses rêveries  (la Laitière et le Pot au lait), La Fontaine ne dit-il pas : « Quel esprit ne bat la campagne ? / Qui ne bâtit châteaux en Espagne ? »

 

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 Information qui suscite l’émotion au sein de tous les défenseurs de la langue française :

 

            Seul organisme habilité à délivrer un titre de correcteur reconnu par le ministère du Travail et enregistré au répertoire national des certifications professionnelles, Formacom (naguère Coforma), école de formation au simple statut d’association, est menacée de disparaître…

            Que se passe-t-il donc ?…  Alors que les bilans de placement des dernières années montrent toujours des chiffres réguliers et très satisfaisants : 50  à 70 %  six mois après le stage, plus de 90 % un an après la formation, et alors que de nombreux candidats, notamment des demandeurs d’emploi désireux de se reconvertir, souhaitent bénéficier de cette formation qualifiante, ces derniers sont privés de financements publics (alors même que la lutte contre le chômage est la première des causes nationales).

     Au fil des années, en effet, les financements publics (par les conseils régionaux, par les conseils généraux, par Pôle emploi…) se sont réduits comme peau de chagrin, jusqu’à aboutir à la situation dramatique actuelle : privés de financements publics, de nombreux demandeurs d’emploi, ne pouvant bien sûr pas payer la formation par eux-mêmes, sont dans l’obligation de se désister, ce qui, par voie de conséquence, risque d’entraîner la cessation d’activité de cette école associative ( = qui n’a pas pour objet de faire des bénéfices) et la mise au chômage des deux derniers employés.

            Cela aurait aussi des conséquences néfastes pour la défense de la langue française : la disparition progressive des correcteurs-réviseurs professionnels, qui luttent au quotidien pour que le français reste au niveau qui doit être le sien serait catastrophique.

 

Chacun peut manifester rapidement son soutien, sa solidarité, à :

Formacom, 19, rue Honoré-d’Estienne-d’Orves, 93500 Pantin. Tél. : 01 56 96 07 20 ; secretariat@formacom.net

voire intervenir tous azimuts, dans la mesure de ses moyens, auprès de personnalités, auprès des médias, auprès d’organismes publics. Merci.

 

 

 

 

 

 

 

 

Le mot du 25 juin 2015

crucial

       Le psittacisme de plus en plus développé chez les politiques et leurs communicants et entourages fournisseurs d’ « éléments de langage » rejaillit dans les médias.  Un exemple en est particulièrement donné, ces tout derniers jours, par l’adjectif crucial.  Employé au sujet des ultimes (?) réunions réunissant de hauts responsables au sujet de la Grèce, ce dérivé de croix fait florès !  Pas un éditorial, pas un commentaire radio ou télévisé du moment sans que surgisse çà et là l’inévitable (?!) crucial…  La langue de bois, le politiquement correct, qui racornissent la pensée et rétrécissent la liberté d’expression, vont de pair, c’est inéluctable, avec un appauvrissement du vocabulaire.

            Crucial pourrait, sans affadir le propos, laisser la place çà ou là, selon le contexte, à capital, primordial, décisif,  majeur, essentiel, vital, déterminant, fondamental…

            Quand une décision est cruciale, elle est décisive et permet de trancher entre deux explications, entre deux hypothèses, comme si, arrivé à la… croix de deux routes, de deux chemins, on devait absolument choisir la bonne bifurcation. Crucial a d’ailleurs signifié « qui est en forme de croix » :  pierres cruciales, incisions cruciales pratiquées par des chirurgiens, et « disposé en croix ». Aujourd’hui, c’est cruciforme qui a ces acceptions : même un « bricoleur du dimanche » sait ce qu’est un tournevis cruciforme !

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La citation du jour :

            « L’ignorance, la sottise et la lâcheté sont les trois plus grandes ennemies du genre humain. » (Arsène Bessette, 1873-1921, journaliste et écrivain québécois.)

 

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Les trois questions de notre concours du mois semblent mettre en échec les internautes…  Aucune bonne réponse pour l’instant !

Le mot du 23 juin 2015

démission

            L’ancien rugbyman Serge Bianco a démissionné de sa fonction de président  du club de Biarritz : la fusion avec Bayonne, qu’il prônait, n’a pas été ratifiée par les deux tiers de l’assemblée réunie mardi 23 juin…

            Le mot démission peut susciter des commentaires divers…  Une démission consiste à se démettre d’une fonction, d’une charge, d’une dignité, etc., ou à rompre un contrat de travail : donner sa démission, lettre de démission… La démission est donc une rupture, volontaire le plus souvent, de la part de celui qui choisit de rompre. L’acte peut donc s’assimiler, à juste raison parfois ou souvent, à un fait de résistance, à la manifestation d’une âme forte, d’un caractère fier peu enclin aux compromissions ou à l’omerta…

       Mais démission est par ailleurs synonyme d’abandon, de renonciation, d’abdication, de fuite devant des difficultés, et le démissionnaire, quand même serait-il de personnalité forte, attachante et respectée, rejoint – aux yeux de l’opinion publique, voire de certains de ses propres amis  –  les individus pusillanimes et frileux. Ce qui peut être très injuste… Démission peut être qualifié de « mot Janus »* !

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*Janus est un dieu romain à deux visages opposés. C’est le dieu des Commencements et des Fins, ayant un visage tourné vers le Passé et l’autre vers l’Avenir.

 

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La question du jour :

            « Est-il correct d’écrire : « Rome se montre soucieux de ménager la France » ? Ne faut-il pas dire : « se montre soucieuse » ? »

            On écrit : « Rome était moins ensoleillée que de coutume ». Il s’agit de la cité, de la ville, et aujourd’hui, quelle que soit la terminaison du nom, on considère que le mot ville est sous-entendu. Donc on écrit : « Oslo était envahie par la brume ; Ottawa a été très embellie par l’aménagement de jardins fleuris. »

            En revanche, quand le nom d’une capitale est employé pour désigner un État, le gouvernement d’un pays, c’est le masculin qui est de règle : « Londres se montre très préoccupé par la situation au Moyen-Orient ».  

 

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La citation du jour :

            « Tout le monde peut faire des erreurs, et les imputer à autrui : c’est faire de la politique. » (Georges Clemenceau.)

Le mot du 20 juin 2015

La question du samedi 20 juin 2015

« Pourriez-vous me donner la signification de « picolo » dans cet extrait de Corps et âme, carnets ethnographiques d’un apprenti boxeur, de Loïc Wacquant (édit. AGone) ?…

            « […] Ça fait chaud aux naseaux. Je bats en retraite, poursuivi par Butch, qui m’a décidément l’air gigantesque. Il a trop d’allonge et il bouge trop vite : mon jab est à peine parti que sa tête n’est déjà plus là et qu’il me poinçonne le picolo de son gauche. Aouch, je vois toujours arriver trop tard son gros poing jaune ; paf, encore en pleine gueule […]. »

 

            Je vais devoir m’en tenir à une hypothèse !…  De chic, je ne connais pas l’acception, et mes recherches rapides n’ont rien donné. Jab désigne un coup de poing rapide, et me poinçonne se comprend aisément : « m’envoie, m’assène, un coup violent ».

            Selon moi, c’est un synonyme argotique de « nez » (encore un mot commençant par la lettre p, comme pif, patate, piton, piment, priseur, pitard…). Faut-il y voir un jeu de mots sur « en avoir un bon coup dans le nez » (= être bien éméché) ?…  Sans doute, plus simplement, la désignation de l’appendice qui, au milieu de la figure, reflète éventuellement – par la couperose, par sa couleur rubiconde, par une forme un peu développée  –  l’habitude de… picoler, de boire, de se rincer la dalle, etc.

            Picolo (moins usuel : piccolo), nom masculin, est bien connu, sinon, pour désigner  un  petit  vin  léger,  trop  léger (= d’après italien picolo : « petit », d’où « petit vin »), de qualité médiocre, voire un vin carrément aigrelet, acide, presque imbuvable.

            Piccolo a d’autres significations, entre autres « petite flûte ».

 

« Poinçonner le picolo », c’est très certainement envoyer un bon bourre-pif !

 

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La citation du jour :

            « Tout Français désire bénéficier d’un ou de plusieurs privilèges. C’est sa façon d’affirmer sa passion pour l’égalité. » (Charles de Gaulle.)

 

 

 

Le mot du 19 juin 2015

dinosaure

 

            Le film Jurassic World  semble avoir battu tous les records lors de sa toute récente sortie en salles : lors du premier week-end, ce nouveau « film de dinosaures » aurait engrangé… 511 millions de dollars de recettes (mondiales).

            Les spectateurs retrouvent donc avec une joie non dissimulée les animaux préhistoriques qui ont fait le succès de la série des Jurassic Park. Depuis maintenant de nombreuses années, des films et dessins animés de grande qualité pour le fond, et aux effets exceptionnels, ont popularisé non seulement auprès du jeune public, mais aussi du grand public en général, les brontosaures, diplodocus et iguanodons, entre autres.

            Ces animaux gigantesques, dotés alors pour la plupart d’une personnalité  sympathique, ne sont plus ressentis comme des monstres terrifiants. On trouve maintenant, parmi les peluches, aux côtés des traditionnels ours, oursons, chiens, chatons, lionceaux, tigrons, ânons, lapins…, pléthore de gentils et aimables diplodocus. Pour Noël, on peut acheter, en concurrence avec les fermettes et leurs lots d’animaux familiers, nombre de dinosauriens… multicolores, ou bien encore des maquettes en balsa d’un stégosaure.

            Dinosaure – du grec deimos (« qui terrifie, qui inspire la crainte ») et sauros (« saurien »)  –  est un terme générique qui, comme dinosauriens, désigne plusieurs familles de ces énormes reptiles à quatre pattes des temps préhistoriques : diplodocus, brontosaures. Une confusion s’est installée, semble-t-il, parce que c’est le diplodocus qui est choisi pour illustrer le type des dinosaures (… peut-être parce que son long cou et sa petite tête – c’est relatif ! –  le rendraient moins effrayant ?).

            Dinosaure est un mot récent (apparu vers 1850), adapté du terme scientifique Dinosaurius créé par le paléontologue britannique R. Owen. Diplodocus (du grec diplous, « double », et dokos, « poutre ») n’est apparu que vers 1890.

            Bien que ces animaux soient donc représentés sous un jour favorable dans les films à images de synthèse, dans les dessins animés, il y a beaucoup à faire pour que le mot dinosaure ne soit plus employé, ni même compris, au sens figuré,   et   particulièrement   en   politique,   sous   des   acceptions péjoratives : « personne âgée qui n’est plus dans le coup », « vieillard gâteux », « politicien dépassé qui se maintient abusivement sur le devant de la scène », « personnage archaïque, aux idées démodées ». Voire… « vieux fossile ».

 

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La question du jour :

            « Faut-il un trait d’union quand on écrit que quelqu’un est le « cent douzième et dernier de l’étape » ? »

L’adjectif numéral ordinal cent douzième (sans trait d’union) est, ici, substantivé, et désigne une personne par sa place, par son rang : ce coureur est le cent douzième (toujours sans trait d’union).  En revanche, on mettrait un trait d’union si l’adjectif numéral ordinal substantivé signifiait une fraction : Chacun des membres du club touchera un cent-douzième des bénéfices  ( =  1/112)…

 

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La citation du jour :

            « Si on avait assez d’argent pour acheter toutes les consciences ce qu’elles valent et les revendre ce qu’elles s’estiment, ça serait, ça, une belle affaire. » (Gavarni, 1804-1866.)

Le mot du 18 juin 2015

rétropédalage

 

            Les commentateurs font ces jours-ci de Mme Ségolène Royal la reine du rétropédalage… Puisque le terme appartient, en premier, au domaine du cyclisme, on pourrait dire de la ministre de l’Écologie qu’elle en est la « petite reine » ! Je précise, pour les Béotiens en cyclisme, que « petite reine » désigne depuis plusieurs décennies la bicyclette des coureurs, en raison du succès énorme remporté par les courses cyclistes, l’essor des grandes classiques et des compétitions par étapes au XXe siècle.

            Mme Royal, face aux vives réactions suscitées en Italie par ce que certains appellent sa « Nutellaphobie » (la ministre a accusé le Nutella, produit de la marque italienne Ferrero, de contribuer gravement à la déforestation en raison de son recours massif à l’huile de palme), et alors que les relations entre Rome et Paris sont déjà tendues à cause du problème des migrants bloqués entre Vintimille et Menton, a décidé de faire un pas en arrière, de pratiquer le rétropédalage en présentant ses excuses…

         Pour autant, il semble injuste de faire de Mme Royal la personnification de l’amateurisme en politique, la princesse de l’abandon, l’impératrice de la pirouette, la Palme d’or de la reculade. Depuis des lustres, un grand nombre de politiciens, toutes opinions confondues,  ont pour  démarche « un pas en avant, deux pas en arrière ». Soit parce qu’ils avaient soutenu des dossiers mal préparés, soit parce qu’ils avaient volontairement avancé de pseudo-propositions afin de tester l’opinion publique et de se calquer ensuite sur le sentiment de la majorité. Les reculades découlent aussi, et le plus souvent, de la peur devant les réactions des innombrables groupes de pression et groupes d’intérêt alors que les politiciens sont, dans ce pays, quasiment tout le temps dépendants des multiples campagnes électorales.

        Au sens propre, le rétropédalage (en un seul mot, sans trait d’union) est un système de  freinage sur vélo inventé par l’Allemand Ernst Sachs en 1903 : l’année de la création du Tour de France !  C’est, plus simplement, le fait de pédaler dans le sens contraire au sens normal…

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La question du jour :

« Faut-il dire : « infesté de… » ou « infesté par… » ?

            Les deux constructions sont licites. On dit : « La capitale de ce pays est infestée d’espions… » et aussi : « Cet immeuble est infesté par les cafards ».

La citation du jour :

            « La bravoure procède du sang, le courage vient de la pensée. » (Napoléon Bonaparte.)

 

 

 

 

 

 

Le mot du 16 juin 2015

CONCOURS DE JUIN :

Reprise des concours mensuels, ce mois !…

Les trois premières personnes qui donneront les réponses correctes aux trois questions ci-dessous recevront des livres + une quatrième personne tirée au sort parmi les bonnes réponses arrivées ensuite. (Ne seront prises en compte que les réponses exactes arrivées AVANT le 30 juin minuit.)

 

1°  Que signifie le dingbat (= rébus sans dessin) suivant ?…

Frédéric MICHEL CASIMIR Gabriel NARCISSE

 

2°  Anagramme : quel personnage se dissimule derrière :  « Un oiseau dès l’aurore » ?

 

3°  Vocabulaire : quel terme français, d’après un mot du vocabulaire politique américain, désigne une circonscription électorale malhonnêtement découpée en vue de favoriser un parti, un candidat ?…

La question du jour :

            « Peut-on écrire, au féminin : « la fille nouveau-née », et, comme substantif : « la nouveau-née » ? »

     L’immense majorité des dictionnaires entérinent, au féminin : nouveau-née(s), nouveau restant invariable en tant qu’adverbe signifiant « nouvellement ». Le mot composé est non seulement un adjectif, mais aussi un nom. Il est par conséquent correct d’écrire et de dire :  la nouveau-née, des nouveau-nées.

La citation du jour :

            « Un peuple n’a qu’un ennemi dangereux, c’est son gouvernement. » (Saint-Just.)

Le mot du 15 juin 2015

bonbon

 

            Les commentateurs évoquent ces jours-ci non une « guerre des boutons », mais  une « guerre des bonbons ». Plus précisément une « guerre des bonbons gélifiés qui piquent » opposant de grands groupes mondiaux qui se… sucrent autour de ce secteur très « juteux », bien loin d’être en crise.

            Bonbon est un mot issu du redoublement enfantin de bon : c’est du nanan, c’est « trop bon », c’est vraiment « bon de chez bon », si les enfants du XVIIe siècle avaient parlé comme les « djeuns » contemporains.  Oui, le XVIIe siècle, le Grand Siècle : c’est dans le très intéressant journal1 du médecin et anatomiste Jean Héroard (1551-1628), dont on retient qu’il fut principalement le médecin du jeune Louis XIII, que l’on voit apparaître le bon bon qui deviendra bonbon.

            Si, devant un b, n devient généralement un m, bonbon appartient aux exceptions (avec bonbonne et bonbonnière). Par analogie avec la douce et fade couleur de bien des sucreries (mais beaucoup de bonbons, entre autres les bonbons gélifiés évoqués plus haut, présentent de vives couleurs), bonbon est couramment employé pour caractériser une nuance de la couleur rose : des robes de poupée rose bonbon, du papier rose bonbon, des chemisiers rose bonbon. Il s’agit donc d’une ellipse pour : « D’UN rose semblable AU rose du bonbon », d’où l’invariabilité. Il n’y a pas de trait d’union dans ce type de syntagmes, de locutions. L’emploi de bonbon seul est plus rare : des rideaux bonbon, des robes bonbon…

            Curiosités : les écrivains Louis Pergaud et Jean de La Varende ont créé, le premier, le dérivé bonbonnet, « petit bonbon » ; le second, le verbe bonbonner, « habitude, voire manie, de manger des bonbons ».

            Bien connue, l’expression coûter bonbon signifie « coûter cher » : Ça coûte bonbon, l’entretien d’une telle villa !  Son arrivée dans le vocabulaire familier est récente : le début du XXe siècle, mais les linguistes sont pourtant hésitants quant à l’origine…  Pour certains, il s’agit d’une accentuation, par le redoublement de bon, de « coûter bon » au sens de « coûter beaucoup », « être onéreux ». Selon d’autres, la locution serait à rapprocher de coûter la peau des fesses, c’est-à-dire coûter le prix de parties du corps auxquelles on tient ! D’où un autre rapprochement, avec des parties intimes auxquelles, hommes ou femmes, on accorde quelque importance : se geler (ou : se peler) les bonbons, porter une robe au ras du bonbon…

            Dans la langue populaire, des choses aussi peu ragoûtantes que des boutons  envenimés,  des  pustules,  des furoncles, sont élégamment dénommés « bonbons à la liqueur ».

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  1. Tenu pendant vingt-sept ans.

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La question du jour :

            « Faut-il dire : « Les festivités battent leur plein », ou : « Les festivités battent son plein » ?… »

            Certains ont prétendu que dans l’expression battre son plein il fallait comprendre « battre plein son », ce dernier mot n’étant pas l’adjectif possessif, mais le substantif masculin. Cette explication est aujourd’hui unanimement jugée comme fantaisiste, car en réalité le substantif est bien plein, et non pas « son ». L’expression en question est l’adaptation figurée de la formule au sens propre La marée bat son plein, le plein étant le niveau maximum atteint par le flot. Par conséquent, au pluriel, il faut dire et écrire : Les Jeux olympiques, les Lyriades de la langue française, les championnats de France de natation, etc., battent LEUR plein.

 

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La citation du jour :

            « L’art de plaire consiste simplement en deux choses : ne point parler de soi aux autres, et leur parler toujours d’eux-mêmes. » (Edmond et Jules de Goncourt.)

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ATTENTION : REPRISE DEMAIN DES CONCOURS MENSUELS !

Le mot du 14 juin 2015

prétexte

            L’actualité, en France, a été dominée, ces derniers jours, par l’aller-retour éclair, en avion gouvernemental, de M. Valls à Berlin, l’autre samedi, pour rencontrer M. Platini, afin de parler de l’UEFA et de l’Euro 2016 en France. Profitant de ce déplacement dit « professionnel » (qui, rapporte la presse, n’était pas noté dans l’agenda officiel du Premier ministre), M. Valls a pu assister ainsi, avec deux de ses enfants, à la finale de la  Ligue des champions entre la Juventus de Turin et le FC Barcelone, cher au cœur du Premier ministre français. Effectivement, M. Valls et M. Platini se sont donc vus, au moins au stade.

            Depuis, M. Valls a reconnu une « erreur de communication » : « Si c’était à refaire, je ne le referais plus », et a promis de rembourser l’équivalent des deux allers-retours de ses fils pour cette virée footballistique, soit, dit-on, 2 500 euros.

            Près de 70 % des Français, d’après les derniers sondages, ne se satisfont pas de ces excuses, peu convaincus par la justification officielle de ce déplacement express en Falcon gouvernemental. La rencontre au sujet de l’Euro 2016 était-elle d’une si considérable importance et d’une urgence si aiguë qu’elle justifiait un aller-retour ultrarapide (tout en prenant le temps d’emmener les deux fils), pour un coût équivalant au salaire annuel de beaucoup de Français : selon la presse, entre 18 000 et 25 000 euros (il est manifestement impossible d’accéder à la vérité, s’agissant de ce type de dépenses, le Premier ministre devant être accompagné d’agents des services de sécurité, d’un médecin, d’un spécialiste des télécoms)… ?

            Peu importe la couleur politique des dirigeants qui se conduisent ainsi.  Mais la petite histoire ne doit pas cacher les questions de fond : un déplacement, même vraiment « professionnel », de ce genre ne peut-il pas être tout bonnement remplacé par un entretien téléphonique, même long ?  Si de tels voyages de ministres, de secrétaires d’État, de hauts fonctionnaires, sans doute ou peut-être inutiles car facilement remplaçables par d’autres moyens modernes de communication, sont multipliés par cent, par mille, etc., à longueur d’année, on peut voir quel gouffre financier supportent là encore les citoyens de la République.

            De plus, comment ce voyage « professionnel » éminemment important et urgent se justifie-t-il quand, quatre jours plus tard, M. Platini vient à Paris voir M. Hollande… pour lui parler de l’Euro 2016 !?

            Prétexte vient du latin praetextus, qui a la même signification. Dans son remarquable dictionnaire français-anglais écrit au XVIe siècle, le linguiste anglais Cotgrave définissait ainsi le terme : « motif spécieux mis en avant pour cacher le motif réel d’une action ». Le sens n’a pas varié, avec comme synonymes : faux-fuyant, excuse, allégation, couverture, échappatoire, argument…

            « Faux prétexte » est évidemment un pléonasme, à ne pas dire ni écrire !

 

La question du jour :

            « Comment faut-il accorder derrière la plupart ?… »

            La plupart (+ complément) entraîne l’accord au pluriel : La plupart ont participé aux jeux ; La plupart des congressistes avaient tombé la veste en raison de la chaleur.

 

La citation du jour :

            « La plus perdue de toutes les journées est celle où l’on n’a pas ri. » (Chamfort.)

 

Rappels :

La prochaine dictée animée sera celle de Leucate (Port-Leucate), le mercredi 29 juillet.  Entre-temps, je serai présent au Salon du livre de Honfleur (Calvados), le 4 juillet, où une fine équipe d’académiciens Alphonse Allais proposera un spectacle-animation. Avec mon illustrateur et ami Claude Turier, lui aussi membre de ladite académie, nous pourrons y dédicacer Sacré Napoléon ! (éditions Trédaniel), un recueil d’anecdotes sur l’Empereur qui paraît pour le bicentenaire de Waterloo, donc ces jours-ci.